mardi 1 septembre 2015

Nurcan Giz à Paris


On ne peut qu’être frappé par le parcours singulier de Nurcan Giz. Elle a commencé à peindre très tôt, mais avant de se consacrer pleinement à son art, elle a d’abord suivi des études de psychologie à l’Université d’Istanbul, sa ville natale. Mais ce qui pourrait sembler une double vie ne l’est qu’en apparence, car elle considère elle-même que ces deux activités, on pourrait dire ces deux faces de sa personnalité, sont intimement liées.
Sa peinture est résolument non figurative, dans le sens où elle ne cherche pas à représenter le réel. Mais on sait bien, pour para- phraser Paul Klee, que l’art n’a pas pour fonction d’imiter le visible, mais de révéler derrière les apparences une réalité autre que celle qui est tangible. Nurcan Giz explore la profondeur de la mémoire, comme pour faire remonter à la surface des souve- nirs et sentiments. Dans une démarche qui relève de l’introspection, elle nous révèle un monde intérieur profondément enfoui.

Avant tout libre, la peinture de Nurcan Giz échappe à tout classement. Elle superpose des grands aplats de couleur sombre obtenus par de larges touches et des gestes rapides, et des fonds plus paisibles et brumeux aux couleurs nuancées, où viennent s’inscrire des traces presque imperceptibles, des coulures, des griffures, des marbrures, cherchant à dévoiler quelque secret.
Ni tumulte ni violence, dans cette peinture, mais du calme et du silence, un climat de méditation poétique. Pourtant, derrière cette apparente immobilité, on sent une énergie intérieure bouillonnante, un mouvement très lent comme un courant de lave qui s’écoule inexorablement.

Nurcan Giz utilise une palette chromatique volontairement restreinte à des tonalités terreuses, des bruns, ocres, bistres, beiges, des gris bleutés parfois teintés de roux. Et la présence du noir fait d’une matière dense et moirée, riche de multiples nuances, non pas symbole d’obscurité mais qui renforce encore l’impression de mystère.

L’agencement des matières et des couleurs crée un sentiment de profondeur. En arrière-plan, des surfaces semblent lointaines, dans des nuances fondues, vaporeuses et transparentes, semblables à des nuages blancs et gris aux formes changeantes. Elles portent parfois des traces, comme des murs qui auraient conservé de lointains souvenirs de la vie qui les a animés. L’artiste évoque elle-même sa fascination ancienne pour les murs, « surfaces qui ont vécu » et qui témoignent de l’écoulement du temps.

Au premier plan, comme autant de signes, les grandes masses noires imposent leur présence frontale et puissante. Dans ces ciels d’orage bas et lourds se livre une lutte silencieuse où des souvenirs lointains et presque effacés cherchent à échapper à l’oubli. De cette confrontation des contraires, de l’opposition du noir et du blanc, émerge une lumière qui éclaire les toiles de l’intérieur et pénètre tout l’espace du tableau.

La peinture de Nurcan Giz, pleine de rêve et de mystère, appelle une exploration attentive, tels les murs du poète Edouard Glissant :
C’est dans les murs
Que sont les portes
Par où l’on peut entrer.

François Arné

Conservateur en chef du patrimoine -  Directeur des Musées du Mans

Nurcan Giz a été sélectionnée par l'UMAM pour la biennale 2014 à Cagnes-sur-Mer

Du 15 septembre au 24 octobre 2015
Vernissage jeudi 17 octobre
Galerie GNG -  3, rue Visconti - 75006 Paris
Tél. : 01 43 26 64 71
galeriegng@wanadoo.fr  - http://www.galeriegng.com

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